Si la gauche a clairement condamné les faits, LR et le RN se sont réfugiés derrière « l’enquête » et le « soutien à la police » jusqu’à parfois rendre la victime responsable de sa propre mort.
L ’émotion et la condamnation du geste du policier auraient pu être unanimes. Les réactions depuis la mort du jeune Nahel à Nanterre, mardi, montrent pourtant une polarisation inquiétante quant à la vision de la police républicaine, de la légitime défense ou des banlieues.
D’une même voix, la gauche a d’abord fait part de son émotion : « Toutes nos pensées vont à la famille et aux proches du jeune homme tué », a déclaré le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel. Et rappelé quelques fondamentaux : « La peine de mort a été abolie en France, personne ne peut la rétablir de manière unilatérale », souligne Thomas Portes (FI). « Le refus d’obtempérer ne donne pas de permis de tuer », redit Olivier Faure, premier secrétaire du PS.
Sur twitter, les députés RN n’ont aucun mot pour la victime ou sa famille
Ces évidences ne le sont plus, au vu des réactions à droite. Car certains responsables politiques ont cherché à relativiser l’acte pourtant documenté par une vidéo. « Si ce jeune est mort, c’est d’abord parce qu’il a cherché à se soustraire à un contrôle », estime le vice-président des « Républicains », François-Xavier Bellamy.
Sur les comptes Twitter des 88 députés du RN, on ne trouve aucun mot pour la victime ou sa famille, aucune condamnation claire de ce meurtre, mais divers messages de « soutien aux forces de l’ordre », dès les heures qui suivent le drame. « Il faut être très précautionneux en respectant la présomption d’innocence, mais ça pose le problème du refus d’obtempérer », avance Sébastien Chenu. « Je n’y étais pas, je ne suis pas juge d’instruction », a réagi Jordan Bardella, se réfugiant derrière « l’enquête en cours ». Il y a une semaine, le président du RN prenait moins de pincettes à propos de l’agression d’une jeune fille et de sa grand-mère à Bordeaux, dressant sur Twitter, « le palmarès de l’agresseur ultraviolent », en listant ses condamnations judiciaires.
Marine Le Pen a attendu 24 heures
Mercredi, Jordan Bardella, qui a « une pensée pour la famille du policier (…) sans doute blessé psychologiquement », a ajouté : « Il est de mon devoir de rappeler qu’il y a 25 000 refus d’obtempérer par an et que les “forces de l’ordre” sont devenues des cibles en banlieue parisienne. » Des chiffres ânonnés par une dizaine d’élus d’extrême droite – comme si ceux-ci pouvaient justifier une mise à mort. Quant à Marine Le Pen, elle a attendu plus de 24 heures avant de réagir depuis l’Assemblée, pour reprocher aux députés de « multiplier les minutes de silence » après un hommage rendu dans l’Hémicycle.
Éric Ciotti, président de LR, s’est aussi longtemps muré dans le silence, avant de réagir aux heurts dans la nuit à Nanterre. Puis de s’en prendre à la gauche, à Marine Tondelier notamment, après que la secrétaire nationale d’EELV a pointé du doigt « le problème du racisme dans la police ». « L’extrême gauche souffle sur les braises et espère une vengeance contre les “forces de l’ordre” », ose Éric Ciotti, dénonçant une « récupération ».
La droite et son extrême accusent aussi la gauche de réagir moins promptement à d’autres drames, comme à Annecy le 9 juin, où l’assaillant était un réfugié syrien. Or, l’acte odieux à Annecy a été unanimement condamné par le monde politique. Dans le cas de la mort de Nahel, LR et RN se montrent incapables de dénoncer une exécution sommaire.
Source: Humanite